De la cour du roi à la Cour Céleste…
Saint Ignace a été nommé
Patron céleste des Exercices spirituels
par le pape Pie XI
Petite vie de St Ignace
Il y a plusieurs façons
de connaître un Saint.
On peut le connaître intellectuellement. On peut tout savoir de sa vie, son histoire et ne l’avoir jamais rencontré. On peut aussi avoir la grâce de le rencontrer et alors la connaissance qu’on en a, est tout autre. On le prie, il intercède pour nous. Nous avons avec lui une relation vivante, il devient un ami. C’est cette connaissance que nous vous souhaitons de St Ignace.
Cela n’empêche pas, bien au contraire, de connaître un peu son histoire, son cheminement. De nombreux ouvrages et d’excellents auteurs vous renseigneront sur Inigo Lopez de Loyola.
Vous pourrez aussi le connaître, à travers l’ouvrage-référence qu’est Le récit du pèlerin ou Autobiographie d’Ignace de Loyola. Dans cet ouvrage, à la demande de ses premiers compagnons, Ignace raconte son cheminement et sa rencontre avec Dieu.
Le parcours spirituel
de St Ignace
a quelque chose du parcours
du combattant
Inigo Lopez de Loyola est né en 1491 à Azpeitia, Pays Basque espagnol. Il meurt le 31 juillet 1556 à Rome. Entre ces deux dates, toute une vie se déroule, de la Cour des Grands d’Espagne à la Cour céleste. Tout un parcours et quel parcours !
Une place au soleil
De petite noblesse basque, Ignace rêve de se faire une place au soleil, de paraître parmi les Grands. À l’âge de 15 ans, orphelin de père et de mère, il devient page à la cour de Ferdinand d’Aragon. Pendant 10 ans, plein d’ambition, doté d’un fort tempérament, Ignace connaîtra les jeux et les intrigues de Cour. Il cherche à séduire, à se distinguer et n’hésite pas à se battre en duel, s’il lui semble que son honneur est bafoué. Dans son autobiographie, il dit de lui qu’il fut un homme adonné aux vanités du monde et, principalement, il se délectait dans l’exercice des armes.
Un boulet de canon français met à terre le fier capitaine
En 1517, Ignace sert le duc de Lara, vice-roi de Navarre. Il a 30 ans lorsqu’il prend part à la défense de Pampelune. Les troupes de François 1er sont bien supérieures en nombre, les Espagnols n’ont aucune chance. Mais pour le fier Inigo, il est impensable de se rendre. Plutôt la mort qu’un tel déshonneur ! On imagine aisément ce tempérament de feu enflammer les troupes et crier : celui qui veut se distinguer davantage au service de son Roi, qu’il me suive ! Divers films espagnols retraçant la vie d’Ignace nous croquent savoureusement cet épisode (cf. “St Ignacio de Loyola“ -film de 1949- sur un cheval cabré, on voit le fier capitaine exhorter ses hommes à combattre jusqu’à la mort.)
Dieu a là une forte personnalité. Pour rencontrer Ignace, Il se servira simplement d’un boulet de canon français. Une jambe brisée, Ignace est à terre; les troupes préfèrent arrêter les dégâts et rendre les armes. Le fier Hidalgo est blessé dans sa chair, mais son honneur est sauf.
Cette bravoure manifestée, lors du siège de Pampelune, l’a précédé au château de Loyola, chez son frère aîné, où on l’accueille en héros. Le capitaine de Loyola sera soigné à la demeure familiale. Il fait les frais d’une “chirurgie” douloureuse et délicate qui parvient cependant à réduire la fracture et, par la même occasion, la jambe droite. Ignace va mieux, mais il ne peut supporter cette infirmité qui l’éloignerait à jamais de l’armée espagnole et de la femme qu’il aime. Ignace rêvait de séduire une femme de la cour, mais pas n’importe quelle femme. La dame de ses rêves était d’un rang si élevé qu’il n’osait même pas prononcer son nom.
Impensable de paraitre ainsi à la Cour
Qu’importe la souffrance, pour cet Hidalgo, il est impensable de paraître claudiquant à la cour. Impensable de paraître dans ses beaux collants avec cette vilaine excroissance sous le genou, face à la femme qu’il aime. Que les chirurgiens se distinguent, à leur tour, davantage dans leur science pour lui rendre ses avantages ! Et c’est ainsi, cette fois par vanité, qu’Ignace choisit la souffrance, voire peut-être la mort, plutôt que le déshonneur ! Avec toutes ces opérations, il est vrai que la jambe s’allonge et, avec elle, la convalescence. Au fil des jours, l’ennui et la souffrance se tiennent compagnie. Mais, parce que Dieu a un plan bien plus grand pour le fier capitaine que celui de paraître dans l’assemblée des Grands de ce monde, Il se sert de ce repos forcé, prolongé par vanité, pour permettre à Ignace d’entrer en lui-même. L’ambitieux Inigo, qui rêvait encore de rivaliser avec les plus fines lames du royaume, va découvrir un combat et des ” Maîtres d’armes ” bien plus subtils que ceux de l’escrime.
À défaut d’avoir survécu à toutes ces médecines et pour tuer le temps, Ignace réclame à sa pieuse belle-sœur quelques romans de chevalerie. Pieux mensonge ou vérité pieuse, celle-ci ne peut lui offrir en guise de lecture que la vie de Notre Seigneur et la vie des Saints. Déception d’Ignace à la vue d’une telle collection. Qu’importe ! Si son corps est faible, son imagination est encore assez vive, elle saura l’enflammer pour inventer quelques actes de bravoure qu’il réalisera, dès qu’il ira mieux… et, en effet, il s’enflamme des heures durant… Mais le retour à la réalité est toujours bien cuisant !
Changement de modèle
Finissant par faire, contre mauvaise fortune, bon cœur, Ignace, nonchalamment, va feuilleter quelques-uns de ces ouvrages. Ainsi, pendant un temps, il passe de ces écrits à ses rêves. Il prend alors conscience que les premiers lui apportent une douce consolation, alors que les seconds le laissent vide et triste. Il fait l’expérience du “jeu des esprits”… et, petit à petit, ses modèles vont changer. Il ne s’agira plus de rivaliser avec les héros fictifs de son imagination, mais de penser que ce qu’a fait un Saint François ou un Saint Dominique mérite réflexion… Peu à peu, la vie de Notre Seigneur va aussi le passionner. Voilà ! voilà enfin un Roi qui mérite d’être servi, un Roi pour lequel on peut tout laisser comme St François… Mais après tout, ce qu’un St François a fait, ce qu’un St Dominique a fait… pourquoi pas moi ?! Et de nouveau, il sent en lui le feu couler dans ses veines pour se distinguer au service de ce Roi ! Son modèle de chevalier s’éloigne, et lui-même quitte le château de Loyola sur une mule.
Du chevalier, il gardera pourtant la noblesse de cœur et quelques manières. Dans cet esprit, il fait une dernière veillée d’arme au sanctuaire marial de Montserrat. Au petit matin, il dépose son épée aux pieds de la Vierge Marie. Il sera désormais le chevalier de Notre Dame. La cour des rois de ce monde deviendra pour lui un vieux souvenir. C’est vers la cour des miracles du Roi des rois qu’il va prendre maintenant sa place.
Il est vrai qu’il y a bien du travail pour enseigner à Ignace un nouveau mode de fonctionnement ! Car, il n’est pas éloigné le temps où celui-ci, en route vers Montserrat, avait sérieusement hésité à passer au fil de l’épée le Maure qui avait, lui semble-t-il, manqué de respect à sa Dame, pardon à Notre Dame. Et si sa mule ne l’avait entraîné sur un autre chemin, il aurait occis le mufle. Prenant le Ciel à témoin, il aurait persisté à faire entendre raison à ceux qui bafouaient, non plus son honneur, mais celui de son Maître, à force de duels ! Mais désireux de suivre le Christ en vérité, cette âme d’acier et de feu allait accepter de tremper dans les larmes du repentir. Humblement et douloureusement, il allait apprendre à faire siennes les armes avec lesquelles on combat sous l’étendard du Christ.
Pendant neuf mois que durera son séjour à Manresa, jour après jour, dans la prière, la pénitence, le service des plus pauvres, il découvrira ce tout autre combat. Il apprendra à ses dépens à connaître et à reconnaître le pire ennemi de la nature humaine (cf. « Les deux étendards »). Il découvrira, à ses frais, les armes sournoises de ce mortel ennemi. Il saura reconnaître ensuite sur de trop nombreuses oriflammes les armes masquées du Prince de ce monde. Mais il aura aussi appris à discerner les filets, les chaînes et divers pièges qu’utilise cet Esprit satanique pour faire tomber les hommes. Il se souviendra avoir lui-même été séduit par l’étendard prometteur de richesse, d’honneur et de gloire. Il reconnaîtra, enfin, que cet ennemi ne dort jamais, qu’il connait toutes les ruses de guerre et collectionne les bottes les plus secrètes. À tout instant, il mène à toute âme un combat à mort ! Mais il demeure vrai également que Notre Seigneur ne se laisse pas vaincre en générosité et qu’Il a déjà terrassé ce terrible ennemi. À l’homme-au-sac qui passait jusqu’à 7 heures de prière à genoux, dans une grotte de Manresa, qui s’infligeait de sévères pénitences pour réparer les abus en tout genre qu’il avait commis dans sa vie passée, Il réservera de ses plus hautes grâces.
Le fier capitaine n’est plus
Même si les bonnes manières de l’homme-au-sac laissaient deviner quelques nobles origines à ce chevelu (Ignace négligeait maintenant sa coiffure et ses ongles que, par vanité, il avait autrefois tant soignés) le fier capitaine était bien resté terrassé sur la place de Pampelune. Une nouvelle vie commençait pour Ignace. Oui, il connut des tentations et des désolations terribles qui le menèrent au seuil du suicide. Oui, il faillit se décourager et fuir le combat, le plus rude certes qu’il n’eût jamais à livrer. Mais Dieu veillait et les consolations succédaient aux assauts harassants de l’ennemi. Les aventures dont il avait pu se vanter dans le monde, ne pouvaient, en rien, rivaliser avec l’aventure intérieure qu’il vivait alors. Un nouvel horizon s’ouvrait, bien plus vaste, bien plus beau que celui de tous les royaumes d’ici-bas réunis. Dieu fit même à l’ancien capitaine la grâce insigne de connaître l’ordre qui régentait toute chose, l’harmonie qui régnait dans le monde. Le pèlerin apprit en cette vision dite du Cardoner, plus qu’il n’apprendra jamais jusqu’à la fin de sa vie.
Et tout prend sens
Il comprit au plus intime de lui-même que l’homme était créé pour louer, révérer et servir son Seigneur et, par là, sauver son âme. Il comprit comment toutes les choses de la terre étaient pour l’homme, pour l’aider à atteindre sa fin, (cf. Ex. spi. n°23 ). Enfin convaincu d’avoir trouvé le Chef idéal, il s’enrôla, dès lors, sous l’étendard de Celui dont le Royaume n’est pas de ce monde et qui n’a, ici-bas, nulle armée. Qu’importe, il se contentera de se nourrir comme lui, de se vêtir de même…peinant avec lui pendant le jour et veillant la nuit, pour que, ainsi, il ait part avec lui à la victoire, comme il aura pris part à la peine. En bon sujet, Ignace répondit à l’appel d’un tel Roi, en faisant l’offrande de tout lui-même (cf. Ex. spi. n° 91 et ss. l’Appel du roi). Puis, avec sa faveur et son aide, prenant sa croix, il Le suivit. Tout pour la plus grande gloire de Dieu !
Ignace maitre du combat spirituel
Dieu se servit de ce tempérament bien trempé, pour en faire un maître du combat spirituel. Ignace s’est laissé séduire par ce Prince, ce Chef idéal, parce qu’il a eu l’humilité de baisser sa garde et ce grand Roi a pu le toucher en plein cœur. Il n’aura de cesse, alors, d’aider les autres, d’aider les âmes à faire cette rencontre avec le grand Séducteur. Que le chemin difficile qu’il a défriché, non sans peine et sans larmes, et que sa riche expérience du combat spirituel, servent au plus grand nombre, tel est son plus grand désir. Il semble, en effet, que le Seigneur des seigneurs ait voulu confier à ce petit boiteux la mission de marcher devant ses frères et de baliser pour eux le chemin de la Cour céleste. Très tôt, des Compagnons se joignirent à lui et, lorsqu’il lui faudra donner un nom à ce petit groupe d’hommes désireux de partager sa vie et son idéal, il n’en trouva point de plus juste que celui de : Compagnie de Jésus.
Naissance des « Exercices »
On peut dire qu’ainsi est né le fameux livre des Exercices de St Ignace. Il le reçut, dit-on, “comme des mains de la Sainte Vierge”, lors de son séjour à Manresa. Il eut, en fait, la grâce de mettre par écrit sa propre expérience et d’affiner, tout au long de sa vie, le texte des Exercices Spirituels. Très tôt, il les donna à ses compagnons, comme à Pierre Favre et François Xavier, avec qui il partageait son logement d’étudiant.
Il eut à débattre avec l’inquisition qui se demandait quel était cet homme dont on disait qu’il avait trouvé le moyen de faire découvrir à chacun la volonté de Dieu. De bonne grâce, à chaque fois, Ignace s’est prêté à leurs questions… et, à chaque fois son livre a été reconnu comme juste. Son ouvrage fut enfin approuvé par le Pape Paul III.
Le Ciel étoilé
Quelle distance entre le temps où le fier capitaine dressé sur les remparts de Pampelune enflammait ses troupes et celui où le compagnon de Jésus, au soir de sa vie, montait doucement sur la terrasse du Gésu. Là, humblement, il retirait son bonnet et contemplait le Ciel étoilé qui lui parlait de Dieu et pleurait. Il avait, comme St François, comme St Dominique, tout laissé, pour suivre Celui-là même qui appelle les étoiles et vers qui elles viennent en tremblant.
Ce n’est qu’un tout petit raccourci de la vie, riche en aventures, de St Ignace que nous avons partagé avec vous ici. Il en a fallu des combats à Inigo de Loyola, avant qu’il ne devienne le Grand St Ignace, fondateur de la Compagnie de Jésus et qu’il s’assoie, enfin, à la table du Roi des rois, où Celui-ci lui avait préparé une place de toute éternité.
Vous pouvez aussi découvrir St Ignace
à travers le film Paolo DY :
Ignace de Loyola